Inégalités sociales : La jeunesse française sacrifiée par les générations précédentes ?

Par Céline Pastezeur - Publié le 09 Juin 2014 à 14:47
Les jeunes sont-ils sacrifiés ?
Le sociologue Louis Chauvel vient de lancer le débat : alors qu’il vient de publier une thèse portant sur les inégalités entre les générations, il affirme que la jeunesse française est la plus sacrifiée parmi les 18 pays occidentaux qu’il a étudiés. Pourquoi, et en quoi ces conclusions suscitent la polémique ?

La jeunesse serait-elle une période bien plus difficile à vivre qu’on ne le pense ? La semaine dernière, Air of melty vous a dévoilé les résultats d’une étude Ipsos révélant qu’un jeune sur cinq est adepte de conduites à risque, à cause de ce qui pourrait ressembler à une recherche d’expériences à tout prix. La question peut alors se poser : les jeunes prennent-ils des risques pour échapper à une réalité qui les déçoit ? Une étude qui vient de paraître dans la revue Social Forces tendrait à mettre en lumière une telle réalité. En effet, selon la dernière thèse de Louis Chauvel, sociologue à l’université du Luxembourg, la France serait le pays qui sacrifierait le plus la jeunesse, sur 17 pays occidentaux au total. Qu’est-ce que cela signifie ? Réponse par ici !

Selon l’explication du sociologue Louis Chauvel, « depuis 1984 en France, par rapport à celui des sexagénaires, le niveau de vie relatif des trentenaires a perdu 17% ». En fait, si les jeunes nés autour de 1975 avaient pu suivre la tendance de croissance exceptionnelle des niveaux de vie dont ont bénéficié les personnes nées entre 1929 et 1950, leur niveau de vie serait, selon l’expert, 30% plus élevé qu’il ne l’est actuellement. Ces chiffres placent la France largement en tête des pays étudiés, six points devant son dauphin l’Espagne. Certes, le chômage est à blâmer, mais pas seulement : les rémunérations en baisse concernent tous les jeunes, même les plus diplômés disposant d’un travail. Comme l’explique le chercheur, « les jeunes qui entrent sur le marché du travail ont beau être plus diplômés que leurs parents, ils sont moins bien rémunérés. C’est ‘l’effet cicatrice’. Un nombre croissant de diplômés se partagent un nombre stagnant de positions sociales confortables, dont le niveau de rétribution nette décline », poursuit Louis Chauvel, qui évoque un « déclassement systémique » de la jeunesse avant de conclure : « Aucun pays n’est allé aussi loin que le nôtre dans cette maltraitance des nouvelles générations ».

Certes, les jeunes disposent de bien moins de sécurité financière que les aînées. Une étude menée par l’Insee a, par ailleurs montré que les jeunes sont ceux qui mobilisent le plus leurs proches pour recevoir de l’aide, financière comme morale. Mais doit-on pour autant en conclure qu’ils sont oubliés et sacrifiés par le Gouvernement français ? Olivier Galland, sociologue de la jeunesse et directeur de recherche au CNRS, considère que non et reproche aux conclusions de l’étude de Louis Chauvel d’être « très excessives ». Il a ainsi rappelé qu’une étude de l’Insee comparant le niveau de vie entre la fin des années 1980 et les années 2000 avait permis de montrer que « la croissance a permis à chaque génération de disposer d’un niveau de vie supérieur à la précédente ». De son côté, l’enquête Génération Quoi menée par France Télévisions l’an passé, et à laquelle avaient répondu pas moins de 210 000 jeunes âgés de 18 à 34 ans, avait mis en avant le fait qu’un jeune sur deux considérait les générations précédentes comme étant responsables de leurs difficultés actuelles.