Vidéo & Réseaux sociaux : R.Ouzeau, « La vidéo restera le format roi sur les réseaux sociaux pour les années à venir » (EXCLU)

Par Céline Pastezeur - Publié le 19 Jan 2017 à 11:23
Romain Ouzeau, CEO d’Iconosquare, répond à nos questions.
La vidéo et les réseaux sociaux, ça matche de plus en plus, au point qu'il devient aujourd'hui indispensable pour les marques de se lancer. Romain Ouzeau, CEO d'Iconosquare, nous en dit plus sur ce phénomène en plein essor, qu'il va falloir maîtriser en 2017.

La rédaction d’Air of melty vous le répète régulièrement : en 2017, la vidéo sociale devrait prendre toujours plus d’importance, au point de devenir incontournable. Alors qu’Unruly dévoilait début janvier ses prédictions en matière de vidéo sociale pour 2017, entre vidéo verticale, live et réalité virtuelle, nous vous faisions savoir il y a peu que le live s’apprêtait à débarquer dans les Instagram Stories. Romain Ouzeau, CEO d’Iconosquare, un outil en ligne qui permet d’avoir une analyse complète d’un compte Instagram, répond à nos questions pour mieux comprendre le phénomène de la vidéo sur les réseaux sociaux et son rapport avec les marques.

-Air of melty : Il semble que, à l’heure actuelle, tous les réseaux sociaux misent de plus en plus sur la vidéo. Comment expliquer ce phénomène et qui a lancé la tendance ?

Romain Ouzeau,CEO d’Iconosquare : La vidéo, ce n’est pas un phénomène nouveau. Mais c’est vrai qu’on constate un essor impressionnant sur tous les nouveaux réseaux que sont Facebook, Instagram, Snapchat, etc. Au départ, la vidéo a été initiée par YouTube et Dailymotion, avant que des acteurs tels que Twitch ne s’invitent sur le marché, en étant plus spécialisés sur le domaine du gaming. Et, ensuite, Periscope, Meerkat et d’autres ont à leur tour franchi le cap en misant plus particulièrement sur le live. L’essor de la vidéo aujourd’hui est aussi lié à l’histoire de la technologie : avec la 3G et la 4G, on peut effectivement avec une production et une consommation accrue, peu importe où on se trouve. Aujourd’hui, n’importe qui peut être un producteur de vidéo via son smartphone et cela change tout, forcément. C’est particulièrement le cas pour les générations Y et Z, qui consomment peu de télévision désormais. Ils ne sont pas habitués à devoir se poser devant leur poste de télévision à une heure fixe pour regarder le programme de leur choix. Aujourd’hui, on consomme une vidéo comme on consommerait un article de blog ou de journal, où que l’on soit et quand on le veut. Par ailleurs, la vidéo est un format ultra intéressant dans le sens où elle crée une relation de proximité, permet de l’interaction et permet de véhiculer plus facilement des sentiments, des émotions. Pour toutes ces raisons, je pense que la vidéo restera le format roi pour les quelques années à venir, notamment grâce à l’intégration des nouvelles technologies telles que la réalité virtuelle.

-Air of melty : Quel format de vidéo est aujourd’hui le plus efficace sur les réseaux sociaux ? On parle beaucoup du succès des micro-vidéos, mais on dit aussi que les formats longs prennent de l’importance. Alors, où donner de la tête ?

R.O : Le fait que tous les réseaux sociaux imposent une limite en matière de durée de vidéo autorisée n’est pas une coïncidence. Je pense qu’il existe un réel potentiel autour des micro-vidéos. Pour les clients avec qui l’on travaille, les vidéos qui sont les plus efficaces durent en général moins de trois minutes. Spécifiquement, sur les réseaux sociaux, le degré d’attention que l’on peut apporter à une vidéo dans un flux Facebook par exemple est assez limité puisque l’utilisateur est sans cesse sollicité par d’autres vidéos, des messages, des statuts ou encore des articles. En cela, trois minutes me parait véritablement être la durée maximum idéale pour un contenu vidéo qui a pour vocation d’être partagé sur les réseaux sociaux. Cela n’empêche pas qu’il existe une audience pour des contenus plus approfondis mais, dans une optique marketing, il me semble plus judicieux de faire la promotion via des contenus courts sur les réseaux sociaux, en pushant éventuellement du contenu plus long et plus enrichi sur une autre plateforme. Il faut faire sortir l’audience du réseau social pour qu’elle puisse se consacrer au contenu ailleurs, pour être moins sollicité par des interruptions en tout genre. Il faut aussi voir les réseaux sociaux comme un moyen de tester des vidéos pour évaluer l’engagement de l’audience ou comme un moyen de teaser cette audience : il n’est pas rare qu’une marque y diffuse plusieurs mini-vidéos avant de proposer un contenu plus long et plus important.

-Air of melty : Peut-on aujourd’hui donner rendez-vous aux utilisateurs des réseaux sociaux pour leur dévoiler une vidéo ?

R.O : Je pense que c’est effectivement une bonne idée. Si l’on veut pusher du contenu conséquent, il faut d’abord créer un teasing. Depuis des années, le cinéma nous présente des bandes-annonces avant de nous dévoiler le film que l’on vient voir, c’est que ça fonctionne. Tout est une histoire d’attention : à l’heure où l’on est sollicité dans tous les sens, particulièrement sur les réseaux sociaux, et à l’heure où les gens partagent de plus en plus de contenus sans forcément les avoir consommés (par exemple, on partage des articles en ayant juste lu le titre), une micro-vidéo de 30 ou 40 secondes donnant un aperçu de ce que pourrait m’apporter un événement ou une vidéo plus longue se révèle très efficace. D’une part, ça me permet de la consommer instantanément parce que c’est très court et, d’autre part, je vais la partager beaucoup plus facilement à mon audience.

-Air of melty : Quel ton adopter en vidéo sur les réseaux sociaux : le sérieux a-t-il sa place ou faut-il privilégier un ton humoristique ? Quelles sont les valeurs les plus virales ?

R.O : Le ton dépend de la stratégie éditoriale de la marque qui communique. On ne peut clairement pas aborder tous les sujets de la même manière. Il y a une certaine gravité à apporter à certains sujets sérieux, car c’est justement l’émotion suscitée qui incitera l’audience à partager ces contenus. Mais les sujets plus légers et plus humoristiques sont aussi très viraux puisque cela permet aux gens de se détendre et d’adhérer plus facilement au contenu. Pour les marques, il vaut clairement mieux miser sur la légèreté et le fun pour engager l’audience. L’idée à retenir, c’est que, comme Simon Sinek le dit, « les gens n’achètent pas ce que vous faites, mais pourquoi vous le faites ». Il faut réussir à créer une communauté autour de la marque et savoir l’animer, autour d’un ton sympathique et très friendly. C’est d’ailleurs l’avantage de la vidéo, qui crée une proximité forte avec l’audience. Le plus important est d’être en accord avec le discours général de la marque.

-Air of melty : Le live est indéniablement le format de vidéo qui s’est le plus développé en 2016. Selon vous, quel est le réseau social qui gère le mieux le virage vidéo/Live aujourd’hui, et pourquoi ?

R.O : Si je dois choisir, je dirais Facebook, pour de nombreuses raisons, tant la qualité du produit que le potentiel. Déjà, d’un point de vue purement analytique et statistique, aujourd’hui, si vous faites un live sur Facebook, vous allez toucher un volume de personnes dans votre audience qui est énorme par rapport à ce que vous touchez si vous publiez un simple post ou une image. La firme travaille énormément sur le live, en les mettant sur le premier plan. En matière de reach, c’est clairement Facebook qui domine le marché. Dès lors, pour les autres plateformes, c’est difficile de lutter…sauf pour Twitch, qui fait du live avec succès depuis des années, sur le marché du gaming. Ce qui fait la force de Facebook aujourd’hui, c’est que la plateforme a réussi à démocratiser le live au point que, aujourd’hui, dans nos contacts, on a tous quelqu’un qui en fait régulièrement. Et ça, c’était inconcevable il y a tout juste un an.

-Air of melty : Comment l’expliquer ? La fonctionnalité Live est-elle née d’une demande de la part des socionautes ou Facebook a-t-il su créer cette demande ?

R.O : C’est une question un peu complexe. Je pense que, d’un côté, il y a un phénomène qui a été initié par Snapchat à l’origine, c’est celui du contenu éphémère, clairement associé au live, avant que Facebook ne prenne le pas et ne comprenne que la vidéo en live remplissait tous les critères de réussite. Pour répondre à votre question, je pense que c’est plutôt né d’une proposition que d’une vraie demande, qui a aujourd’hui explosé. Le live fait désormais partie des formats à privilégier sur les réseaux sociaux en matière d’engagement.

-Air of melty : Comment les marques peuvent-elles l’exploiter pour se démarquer auprès des jeunes ?

R.O : La première chose que les marques doivent faire aujourd’hui, c’est changer leur mentalité. Aujourd’hui, nombreuses sont celles qui passent à côté de belles opportunités parce qu’aller en live leur fait peur. Que l’on soit une multinationale comme une PME, le live met forcément la pression : c’est un format que l’on ne peut pas maîtriser de A à Z et il faut donc accepter de ne pas être parfait. Mais, justement, les marques doivent comprendre que c’est là tout l’intérêt de ce format : même si c’est imparfait et incontrôlable, le live permet une interaction exceptionnelle avec l’auditeur, en créant une certaine intimité et un sentiment d’authenticité. Et il n’y a aucune limite à la créativité en matière de création de live : Q/A, annonces, lancements, interviews d’influenceurs, backstages, tout a sa place dans ce format.

-Air of melty : Quelles nouveautés en matière de vidéo peut-on envisager sur les réseaux sociaux pour 2017 ?

R.O : Clairement, 2017 devrait être l’année où les filtres débarqueront sur le live. Mais, selon moi, la modération des live sera le plus gros enjeu des réseaux sociaux en 2017, avec la monétisation. Car la publicité va sûrement arriver sur le live, où l’on pourra par exemple acheter un produit depuis une vidéo live autour d’une offre spéciale. L’équivalent du téléshopping sur les réseaux sociaux a déjà débarqué aux Etats-Unis, avec l’aide d’influenceurs. On devrait aussi miser toujours plus sur la réalité virtuelle, augmentée, les vidéos à 360°, avec des possibilités que l’on n’imagine même pas encore. Plus globalement, je pense que, demain, on va assister à l’évolution de la grille TV, avec chaque utilisateur qui aura sa propre chaîne de télévision personnalisée, avec des sources de vidéos différentes, qui sera visionnable n’importe quand et par n’importe qui. Chacun sera un broadcaster avec sa chaîne TV, qui sera un mélange de live, de séries, de micro-vidéos et bien plus encore.