Diktatorn, la dictature transposée dans un programme de télé-réalité, message (pas) reçu par les jeunes ?

Par Céline Pastezeur - Publié le 19 Nov 2014 à 09:33
Les jeunes au coeur de l’émission.
Depuis le 28 octobre, une chaîne de télévision suédoise diffuse une nouvelle émission de télé-réalité baptisée Diktatorn. Alors que les 18-24 ans constituent le coeur de cible du programme, la polémique autour de celui-ci enfle et laisse à penser que le message censément citoyen de l'émission risque d'être mal perçu. La télé-réalité, mauvais outil de communication pour les sujets sérieux visant les jeunes ?

Les Hot Topics et les Tops 10 de meltyMetrix, le service Smart Data de meltygroup, le mettent en lumière régulièrement, la télé-réalité passionne toujours les lecteurs de melty.fr. La dernière preuve en est que l’affaire Nabilla a quasiment viré en affaire de télé-réalité suivie par les jeunes et commentée heure après heure sur les réseaux sociaux depuis 10 jours. Pourtant, le fait que la jeune femme de 22 ans soit soupçonnée d’avoir poignardé son compagnon n’a rien d’une fiction ou d’une mise en scène télévisuelle. Simplement, le programme de télé-réalité qui avait suivi la bimbo dans son quotidien semble aujourd’hui avoir dépassé le cadre de l’écran. Quoi qu’il en soit, le fait est là : outre un indicateur d’intérêt melty élevé, les audiences télévisées comme sociales témoignent régulièrement de l’intérêt que portent les 15-30 ans aux programmes de télé-réalité en tout genre. Seulement voilà, de nombreux concepts semblent aujourd’hui s’essoufler et les jeunes semblent se lasser. En témoignent les audiences mitigées du retour de l’émission Les Princes de l’Amour saison 2 sur W9 la semaine passée. Alors, les chaînes de télévision cherchent à innover en permanence, en repoussant toujours plus loin les limites. En septembre dernière, Air of melty vous avait parlé d’Utopia, la nouvelle télé-réalité qui aurait pu éveiller la curiosité des jeunes citoyens. Le concept ? Une quinzaine de candidats sont invités à passer une année entière ensemble, isolés du monde extérieur, pour y créer et y gérer leur société idéale. Démocratie ou dictature, le choix leur appartient, ou pas. Finalement, faute d’audience, l’émission a été annulée au bout de quelques semaines. Mais une nouvelle innovation télévisuelle s’apprête à débarquer, sous le nom de Diktatorn…

Vous l’aurez compris, le nom de l’émission laisse peu de suspense quant au contenu comme au ton de cette nouvelle émission suédoise, qui place huit jeunes âgés de 18 à 24 ans sous l’autorité d’un « guide » censé veiller au respect et au bon suivi des ordres dictés par un dictateur invisible. La Voix, si prévoyante et souvent appelée Papa par les candidats de Secret Story, prend ici une toute nouvelle dimension. Officiellement, le programme de la chaîne de télévision suédoise SVT2 entend éduquer les jeunes générations sur les libertés fondamentales qu’elles prennent pour acquis en leur en montrant les limites. Il entend aussi redonner envie aux jeunes du pays de s’intéresser à la politique et leur rappeler l’importance du maintien de la démocratie. Oui mais voilà, depuis le début de sa diffusion le 28 octobre dernier, l’émission suscite plus de polémique que d’engagement citoyen.

Cette émission, au concept très délicat tant il est susceptible de déraper (ce qui est déjà le cas d’ailleurs, puisque des propos islamophobes tenus par un candidat ont d’ores et déjà créé la polémique en Suède), reprend l’idée de l’expérience menée par Ron Jones en 1967 dans un lycée américain, avec sa « troisième vague », une mise en situation à l’origine allemande qui avait pour but de montrer à des lycéens comment une dictature peut rapidement s’installer, en une semaine à peine. En 2008, le long-métrage allemand La Vague, de Dennis Gansel, avait également repris ce concept et marqué bien des esprits. Alors certes, la formation citoyenne de la génération Y est un enjeu capital dans notre société actuelle. Certes, cette génération Y se laisse très souvent séduire par la télé-réalité. Mais souvent, ces programmes sont associés à un moment de divertissement, de légèreté. Ici, Diktatorn semble porter un message trop complexe pour trouver l’adhésion du jeune public. En atteste le fait que 100 000 couronnes sont en jeu pour le grand gagnant de l’émission, mais que les candidats eux-mêmes ne savent pas s’ils doivent suivre les ordres du dictateur à la lettre ou à l’inverse se rebeller pour les remporter ! Affaire à suivre…