Rising Star : « L’interactivité est un enrichissement du programme, les prochains formats ne doivent pas miser que sur ça » (EXCLU)

Par Céline Pastezeur - Publié le 15 Nov 2014 à 10:20
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Rising Star, c’est désormais terminé. Avant de tourner la page sur le télé-crochet 2.0 de M6, Air of melty a interrogé une dernière fois Gabrielle Benchetrit, spécialiste de la Social TV et rédactrice pour le site Socialtv.fr, afin de faire le bilan du programme, avec ses tops et ses flops. La suite, c’est par ici !

Hier, Air of melty vous révélait les dernières audiences de Rising Star et se demandait si le bilan était tout flop ou un peu top pour le télé-crochet innovant de M6, qui a connu des semaines difficiles et qui a été la cible de nombreuses critiques, en dépit d’une innovation reconnue de façon unaninme. Spécialiste du sujet, Gabrielle Benchetrit, rédactrice pour le site Socialtv.fr, a accepté de nous donner son avis sur le sujet.

Quel bilan faites-vous de Rising Star : tout flop ou plutôt flop à relativiser ? Personnellement, quels sont vos tops et vos flops au sujet de l’émission ?

Le bilan est bien entendu mitigé. En termes d’audience, c’est un flop. De 3.8 millions de téléspectateurs et 16.9% de part de marché lors du lancement, l’émission est passée à 1.6 millions de téléspectateurs et 8% de part de marché. C’est une perte considérable, surtout pour une chaîne populaire et généraliste comme M6. Comme j’avais déjà eu l’occasion de le dire, la déception du 1er épisode a sans doute contribué à ce résultat. Cependant, il faut noter la forte réactivité de la chaîne qui a su améliorer la qualité du programme au fil des semaines. Le niveau élevé des talents est aussi un top. Personnellement j’ai été plus sensible aux talents révélés par Rising Star que ceux de certains télé-crochets populaires. Le grand top de cette expérience, ce sont les datas récoltées. Grâce aux millions de votes sur l’application 6 play, la chaîne a pu récolter une masse incroyable de données personnelles sur les internautes. Cette base donne la possibilité de cibler un maximum et c’est un argument de taille face aux annonceurs. Avoir un tel support offre la possibilité de personnaliser son offre publicitaire pour coller au plus près de la demande. Enfin, M6 se démarque aujourd’hui en proposant des formats innovants. Pour l’audace, la chaîne mérite d’être saluée.

Est-ce que le bilan de l’émission permet de mieux comprendre ce qu’attendent les jeunes Français de la Social TV ? Le bilan décevant de l’émission montre-t-il que notre pays n’est pas prêt pour une telle interactivité ?

Difficile à dire compte-tenu du fait que je ne dispose pas des chiffres d’audience par cible. Je sais seulement que dans les premiers épisodes, M6 réalisait un meilleur score sur les ménagères. Il ne faut pas oublier qu’aujourd’hui encore, 68% des Français préfèrent regarder la télévision de manière passive. Une telle interactivité n’est pas un frein. Il faut la présenter comme un enrichissement et non un concept. Ceux qui ne votent pas, que ça soit par sms ou par une application gratuite, n’étaient pas au rendez-vous. Cela souligne donc que l’interactivité n’était pas le problème. Le fait de l’avoir autant mise en avant a pu, en revanche, exclure une partie des téléspectateurs qui auraient pu penser que ce type de programme n’était pas pour eux. Au niveau de l’expérience socialtv en tant que telle, même pour les adeptes, elle était compliquée. C’est le défi majeur engendré par les mutations que traverse la télévision aujourd’hui : être capable de démocratiser les dispositifs et de les simplifier au maximum.

Quelle leçon Rising Star peut-elle apporter aux prochains télé-crochets interactifs, ou prochains programmes interactifs d’ordre général ?

Ce qu’il faut d’abord retenir est que l’interactivité est un enrichissement du programme. Les prochains formats ne doivent pas miser que sur ça. L’idée est d’apporter une valeur ajoutée et de répondre aux nouveaux usages des téléspectateurs sans pour autant ennuyer ceux qui ne souhaitent pas y participer. Il ne faut pas matraquer le téléspectateur. Internet bouscule les usages. Aujourd’hui, il y a à la fois une révolution technologique et une révolution sociologique. D’un côté, la dimension technique multiplie nos supports et offre de nombreux services (live-tweet, catch-up, gamification). Chaque foyer dispose d’environ 6 à 8 écrans. Et chaque écran n’est plus cantonné à une seule activité. Il y a convergence. Ainsi, on peut regarder la télévision sur son ordinateur, sa tablette tactile ou son Smartphone. On peut surfer sur internet avec son téléviseur etc. De l’autre côté, la dimension sociologique. Il y a une évolution de nos usages. Les deux révolutions sont corrélées. Comme il y a plusieurs écrans, il y a personnalisation de son usage de la télévision. Mobilité des supports, délinéarisation de la consommation télévisuelle, fragmentation des usages et nouvelles formes d’interactions sont les enjeux majeurs de la télévision d’aujourd’hui. Le défi pour les diffuseurs et producteurs de contenu est par conséquent de créer des formats qui pourront à la fois satisfaire ceux qui souhaitent accéder à ces contenus sans pour autant causer une rupture avec le reste du public. En somme, de se forger une place dans ce nouvel écosystème.