Rocket Fuel, « il faut garder en tête que la dernière action n’est pas forcément la plus importante » (EXCLU)

Par Céline Pastezeur - Publié le 10 Nov 2016 à 12:48
Eric Clemenceau a répondu à nos questions !
En matière publicité, on le sait, la jeune génération se révèle incroyablement exigeante. Alors, comment s'assurer de la bonne réception de messages commerciaux ? Le mot d'ordre est simple : misez sur le cross-device. Mais misez bien. Pour en savoir plus, Eric Clemenceau, Managing Director France de Rocket Fuel, a accepté de répondre à nos questions.

Il est parfois difficile de faire matcher les jeunes et la publicité. Pas plus tard qu’il y a quelques heures, la rédaction d’Air of melty vous le montrait en vous dévoilant les formats mobile les plus intrusifs selon les 18-29 ans. Mais tout espoir est loin d’être perdu. Eric Clémenceau, directeur général France de Rocket Fuel, une société spécialisée dans l’achat programmatique, dotée d’activités de DSP, DMP et trading desk propriétaires, répond à nos questions au sujet de la tendance du cross-device pour toucher les Millennials.

-Air of melty : Concrètement, que propose Rocket Fuel en termes d’offre aux marketeurs ? Comment peut-on présenter Rocket Fuel ?

Eric Clemenceau : Avant de présenter l’offre de notre boîte technologique, je voudrais mettre en contexte un élément important : encore aujourd’hui, on continue à faire de la publicité et de la communication comme au deuxième millénaire. L’idée, c’est de passer au troisième millénaire et d’utiliser les technologies pour ce qu’elles sont. Ce que propose RocketFuel aujourd’hui, c’est une déconstruction complète de la façon dont est opérée la publicité. On veut permettre d’acheter de la publicité et de l’inventaire au meilleur moment à la meilleure offre, à la meilleure personne. Big Data, intelligence artificielle, programmatique et temps réel, ce sont les mots-clé chez nous. Pour vous donner une idée de toute la data que nous traitons, nous agrégeons plus de data en une journée que le NASDAQ en un mois ! Tout cela pour permettre la mise en place de mass market individualisé et de s’adresser à des individus uniques, à des moments uniques. Nous proposons aux marketeurs une base de 3 milliards de profils dans le monde et 1,2 milliard de profils uniques, pour permettre une communication individualisée qui s’adapte à chacun en temps réel. Il faut casser les silos, ne pas se contenter d’un seul média ou d’un profil socio-démographique, à l’heure où chaque individu mène 10 vies en une. La data nous permet de passer à une publicité du troisième millénaire.

-Air of melty : On parle beaucoup du fait que la jeune génération est encore plus exigeante que ses aînés en matière de publicité. On le voit notamment avec l’essor des AdBlockers. Comment le gérez-vous aujourd’hui ?

E.C : Clairement, en matière de publicité, on utilise encore aujourd’hui des techniques complètement dépassées. Déjà, je l’ai dit plus tôt, le ciblage uniquement par rapport à un média n’est pas suffisant, n’est plus suffisant. Quand vous êtes sur une chaîne ou sur un site sur lesquels vous allez voir des publicités qui sont en affinité avec ce que vous voulez à ce moment-là, vous n’allez pas percevoir cela comme de la publicité. Vous allez voir ça comme de la communication, comme un service qu’on vous rend, et non pas comme une agression. D’un côté, les gens ne veulent pas être « cookiefiés », ils refusent qu’on leur prenne leurs informations. Et, de l’autre, ils veulent avoir de la publicité exclusivement pointue et qui corresponde le mieux possible à ce qu’ils veulent à ce moment-là. En réalité, je pense les gens veulent simplement voir de la publicité qui les intéresse au moment où ça les intéresse. Et pour y parvenir, au lieu de s’arrêter à 2-3 critères socio-démographiques qui excluent plus qu’ils ne ciblent réellement, on doit miser sur des dizaines, voire des centaines de critères différents (des suites de critères pour être plus précis), grâce à la data. Plus le scoring est compliqué, meilleur on est.

-Air of melty : Qu’est-ce qui caractérise le cross-device aujourd’hui ?

E.C : Aujourd’hui, une grande partie des technologies sont très mono-média et même mono-device. Cela évolue, et c’est très bien, mais c’est assez lent. Ce qui est intéressant aujourd’hui au sujet du cross-device, ce sont les deux grandes approches qui sont faites sur l’online : l’une qui est déterministique et l’autre qui est probabilistique. Pour la première, si l’on prend l’exemple de Facebook, cela permet de savoir exactement qui est connecté et sur quel support. Mais la limite, c’est que la plupart des sites déterministiques, à l’exception de quelques géants dont Facebook, sont incapables de joindre les individus à grande échelle. Et même ceux qui sont très gros permettent difficilement d’extraire des informations de leur univers vers d’autres univers. De son côté, l’approche probabilistique est de plus en plus fine. Nielsen a récemment fait une étude aux Etats-Unis, montrant que le cross device mené par RocketFuel a effectivement touché 97% des personnes visées. J’ajouterais que, à l’heure où les gens passent de plus en plus de temps sur leur mobile, ce qui multiplie le nombre de data de façon extraordinaire, de touchpoints, et donc de rendez-vous qu’on peut avoir avec le consommateur, il faut garder en tête une idée essentielle : la dernière action n’est pas forcément la plus importante. Alors que la validation de l’achat continue de se faire sur le desktop, le processus de recherche se fait largement sur le mobile. C’est donc très logiquement qu’il faut miser sur le cross-device en permanence.

-Air of melty : Existe-t-il encore une réelle frontière entre online et offline ?

E.C : Le cross-device entre online et offline est encore quelque peu compliqué, même s’il y a clairement des essais. Il n’est toujours pas facile d’établir le lien entre ce qui a été recherché par un consommateur en ligne et son comportement directement en magasin. Ce n’est pas forcément lié au média ou à la technologie mais aussi à la spécificité de chaque secteur. Mais il y a clairement des acteurs technologiques qui se lancent en test & learn. Par exemple, nos DMP permettent de retrouver le consommateur à partir d’une action qu’il a réalisé en ligne, pour lui proposer, en offline, les meilleures offres en corrélation avec les recherches effectuées par lui online. C’est quelque chose de très puissant, que l’on met en action avec 8 des plus grosses banques américaines actuellement.

-Air of melty : Pouvez-vous nos présenter votre méthodologie « Marketing du Moment » ?

E.C : Il faut arrêter de penser à cibler des devices et plutôt penser à cibler les gens derrière ces devices. Et, pour être efficace au maximum, il faut les viser au bon moment, au moment qui leur correspond pour acheter ce qu’ils recherchent. Ce n’est pas parce que j’ai identifié la meilleure personne à viser que mon travail est terminé, encore faut-il trouver le bon moment pour s’adresser à elle. Le bon moment, ce n’est pas qu’une question de timing, mais aussi d’environnement. Et l’environnement adéquat peut parfois être surprenant ! Par exemple, nous avons remarqué que l’endroit le plus performant pour vendre un certain type de véhicules, c’est sur les sites d’emploi. Ce ne sont pas toujours des constats évidents, mais on parvient à les faire grâce à la data. On sait ce que font les internautes, et on doit donc savoir quand exactement leur fournir la publicité. En général, le surf de chaque internaute change peu au quotidien, donc on sait qu’on va le revoir, entre 40 et 60 fois par jour. A nous de trouver le bon moment pour diffuser la bonne publicité, tout en évitant la surexposition, qui est tout simplement insupportable pour le consommateur.

-Air of melty : Justement, quels conseils donneriez-vous aux annonceurs pour ne pas braquer la jeune génération en matière de publicité ?

E.C : Dans l’univers du display en programmatique, vous avez la possibilité de ne plus traiter des cibles mais des individus uniques grace à la data comportementale et soci-demographique. Ce que je conseillerais tient en 6 points principaux : ne pas se limiter au socio-demo mais se concentrer sur la data combinée Socio Demo + comportementale; ne pas se limiter à la data publisher ou third party data mais encore et toujours se fier à sa first party data, le trafic sur site et les profiles des visiteurs; ne pas créer trop de tactiques média mais se concentrer sur le cross device; ne pas présumer du capping mais avoir un capping dynamique adapté à chaque type d’utilisateur; ne pas présumer de l’efficacité d’une créa mais faire de l’AB testing en temps réel sur différentes créas et pack-shot; enfin, ne pas se limiter à une seule créa mais profiter des solutions DCO non plus uniquement en retargeting mais aussi en prospection. En conclusion, on en revient à ce que disais en réponse à votre première question : il faut faire du Marketing du 3ème millénaire, avec la Technologie du 3ème millénaire pour s’adresser aux individus du 3ème millénaire.