Little Corner, « Les moments d’attention sont plus courts pour les Millennials, mais plus intenses » (EXCLU)

Par Céline Pastezeur - Publié le 16 Nov 2017 à 11:46
En cette année 2017, les jeunes auraient un temps d'attention limité à 8 secondes, selon plusieurs enquêtes. Dans le cadre de notre interview de la semaine, Efraim Clam, fondateur et CEO de LittleCorner, startup spécialiste de l'affichage digital dans les lieux insolites, a répondu à nos questions pour nous en dire plus sur le rapport des Millennials à la publicité.

Vous le savez si vous lisez notre site, la mission quotidienne de la rédaction d’Air of melty, c’est de vous aider à cerner toujours mieux la jeune génération. Dans cette logique, nous vous présentons régulièrement des conseils pour mieux vendre aux Millennials. Mais puisque bien communiquer auprès de cette cible est aussi primordial, nous avons posé quelques questions à Efraim Clam, fondateur et CEO de LittleCorner, startup spécialiste de l’affichage digital dans les lieux insolites. Alors, qu’est-ce qui caractérise l’attention des moins de 35 ans face à la publicité ?

Air of melty : Pouvez-vous nous présenter LittleCorner ? Comment est venue l’idée de lancer cette start-up ?

Efraim Clam, fondateur et CEO de LittleCorner : LittleCorner, spécialiste de l’affichage digital out-of-home (DOOH) dans les lieux insolites, propose des solutions de communication dont l’efficacité est maximale dans les toilettes de lieux haut de gamme et affinitaires. J’ai été personnellement confronté à la problématique de la monétisation de l’audience publicitaire durant mes études lorsque j’ai créé Prepanet, un site de partage de sujets et de corrigés pour les préparationnaires. Le site accueillait 30 000 visiteurs uniques chaque mois, mais mes revenus publicitaires ne décollaient pas. Quelques années plus tard, une publicité Axe vue dans des toilettes ne sortait pas de ma tête. J’ai confié cette histoire à mon père, psychanalyste, qui m’a rapporté la théorie de Freud sur la mémoire subliminale liée à des sensations positives. Ces éléments m’ont poussé à m’intéresser au DOOH, en plein essor, lorsque j’étais consultant chez Capgemini. Little Corner a été le fruit de ces différentes expériences !

Air of melty : On dit que le temps moyen d’attention est désormais inférieur d’une seconde à celui de poisson rouge. Est-ce aussi le cas voire encore plus le cas pour les Millennials ?

E.C : En effet, selon une étude menée par Benoit Régent de Dentsu Aegis Network, sur les trois formes d’attention que sont l’attention sélective (repérer un changement dans son environnement), l’attention divisée (faire deux choses en même temps) et l’attention soutenue (la concentration), il est prouvé que les Millenials ont plus de difficulté avec l’attention soutenue, longue. Quant au multitâche, pas de souci pour les Millenials. La vraie conclusion est que les moments d’attention sont plus courts pour cette tranche d’âge, mais plus intenses.

Air of melty : Quels sont les ingrédients à exploiter aujourd’hui pour attirer l’attention des Millennials et du grand public dès la première seconde ? Quelles sont les erreurs à éviter à tout prix ?

E.C : Il existe un ingrédient essentiel à exploiter pour attirer l’attention d’un public donné. Il faut communiquer sur un média qui a le « monopole de la parole » à un moment donné. Nous avons justement conçu les écrans LittleCorner sur la base de ce constat. Une fois installé dans une cabine de toilette, il devient le seul objet communication, le téléphone étant (généralement) dans la poche. Aucun autre message ne peut être affiché dans la cabine. L’attention de la cible est alors exceptionnellement forte. La publicité au cinéma affiche également cet attribu : avec un taux de mémorisation de 75% (vs 85% pour les toilettes, étude TNS). Autre piste qui fonctionne auprès de Millenials : le « pre-roll », pour les formats vidéo. Les études montrent que, malgré l’agacement de ces spots, le système fonctionne. Néanmoins, il est important d’optimiser, par des pré-rolls courts, par de l’humour, par divers modes d’affichage proposés par les réseaux. Le cerveau est maintenant capable de percevoir un message vidéo même en une fraction de seconde par exemple en scrollant dans un fil de réseau social. Néanmoins, la profusion de plateformes et d’approches crée de la confusion. Enfin, l’erreur principale à éviter c’est de penser que ladite « puissance » d’un media génère de l’attention. En effet, le grand public est aujourd’hui très habitué à la publicité et il est capable de consommer une pause publicitaire télévisuelle ou un dispositif d’affichage extérieur puissant (dans le métro ou en gare par exemple) sans y porter la moindre attention et sans aucun effet de mémorisation. D’autant qu’avec son smartphone l’individu s’en détourne facilement. Occuper le terrain n’est plus une action suffisante pour générer de l’attention. Les marques doivent plus que jamais savoir engager leurs cibles, soit par la créativité du contenu, soit grâce au caractère innovant doit media/support. Idéalement les deux !

Air of melty : Diverses études montrent régulièrement que les Millennials restent fortement impactés par l’affichage publicitaire. Pouvez-vous confirmer cette tendance ?

E.C : Les 13-34 ans sont particulièrement curieux et passent beaucoup de temps hors de leur domicile. Pour Médiamétrie ils sont « friands » de loisirs, de musées, d’expositions, de pratiques sportives… ils aiment consommer des media nouveaux et adorent tester de nouveaux services. Ce style de vie « en mouvement » et cette curiosité sont particulièrement bien adaptés aux supports d’affichage extérieur, notamment lorsqu’ils intègrent des technologies améliorant leur expérience de consommateur. La publicité de demain pénétrera donc les usages, elle sera servicielle, dans la continuité de ce qui se passe déjà aujourd’hui.

Air of melty : Comment l’affichage permet-il aujourd’hui encore de surprendre le grand public : faut-il miser sur de l’affichage digitale, une notion d’experience, d’interactivité…?

E.C : L’interactivité est extrêmement difficile à générer en affichage extérieur, car il impose de prendre du temps à des citadins en déplacement et souvent pressés. Les technologies digitales sont la solution. Le « RealTime Advertising » propose par exemple de modifier en temps réel, ou quasi-temps réel, le contenu du spot pour y intégrer du contenu comme un résultat sportif, le nombre de billets restants pour un concert, un prix cassé pour un voyage… Ainsi, quand l’intelligence artificielle et les objets connectés assistent ces process, l’efficacité, et donc la conversion en acte d’achat, sont encore plus grandes. Le succès des campagnes que nous avons réalisées pour des annonceurs comme Uber, LeCAb, Carrefour (pour leurs services) ou encore Digitick et FNAC spectacles, en est la preuve.

Air of melty : Comment mesurez-vous l’efficacité de ces dispositifs d’affichage ?

E.C : Grâce aux capteurs qui équipent nos écrans et à la R&D que nous avons réalisée depuis 3 ans nous sommes capables de fournir en temps réel à l’annonceur le nombre exact de vues complètes qui sont générées pendant sa campagne sur notre réseau. Cela en respectant naturellement l’intimité des utilisateurs, ce qui est par ailleurs un véritable sujet pour des support publicitaires DOOH qui utilisent des caméras (pour analyser les émotions ou le regard par exemple). En rapprochant cette statistique de ses propres chiffres (utilisation d’un code promo, visites en magasin, visite d’un site internet, download d’une application etc.), l’annonceur mesure en temps réel l’efficacité de notre dispositif. La satisfaction client vient naturellement valider notre offre, tant chez les « grands » annonceurs (Carrefour, Warner, Amazon…) qu’auprès des startups. Ces dernières sont également très friandes de notre offre qui leur permet d’accéder des campagnes créatives impactantes à moindre frais et avec une véritable visibilité sur chaque euro dépensé.

Air of melty : De manière générale, comment envisagez-vous l’avenir du business de l’attention ? À quelles évolutions peut-on s’attendre ?

E.C : La publicité devrait être de plus en plus intelligente et efficace, grâce à la technologie, à l’I.A. et aux capteurs. Le nombre d’informations que chaque individu reçoit quotidiennement va probablement continuer à croître (notifications des objets connectés, messages des réseaux sociaux et des services de messageries, chatbots,…) et avec lui la difficulté de générer de l’attention. Sur l’approche créative, les formats courts seront favorisés. Attention cela nécessite une création dédiée, ne pas vouloir « raccourcir » un spot d’une minute en vingt ou dix secondes ! Il nous semble que dans ce contexte tous les formats et supports de communication qui pourront générer sur une période assez longue (+ de 30 secondes) un monopole de l’attention, de manière non intrusive, auront un réel avantage comparatif et généreront d’excellent taux de mémorisation et conversion vers l’achat.