Marketing d’influence : Lefty, “Plus humain et authentique, il améliore l’image des marques” (EXCLU)

Par Céline Pastezeur - Publié le 13 Juil 2017 à 07:14
Micro-influenceurs, TikTok, Social Commerce, comment le marketing d’influence a changé depuis la pandémie ?
Place à l'interview de la semaine, placée sous le signe du marketing d'influence ! Pour la peine, Thomas Repelski, co-fondateur de Lefty, qui accompagne les marques dans la conception et la mise en place de leurs campagnes de marketing influenceur sur les réseaux sociaux, a accepté de tout nous dire sur LA tendance forte de l'année 2017.

A l’heure où les stars du digital ont une influence désormais plus forte que celle des célébrités issues de l’industrie mainstream, le marketing d’influence représente un enjeu de taille en cette année 2017. Après vous avoir dévoilé les bonnes pratiques de transparence et de loyauté à adopter au plus vite en la matière, Thomas Repelski, co-fondateur de Lefty, qui accompagne les marques dans la conception et la mise en place de leurs campagnes de marketing influenceur sur les réseaux sociaux, nous livre son regard sur le sujet. Une façon de vous aider à toujours mieux cerner le phénomène en marche.

-Air of melty : Pouvez-vous nous présenter Lefty en quelques mots ? Comment l’entreprise a-t-elle été créée et quel est son rôle ?

Lefty : Thomas Repelski, Roman Berenstein et Christian Rivasseau se sont rencontrés il y a une dizaine d’années à Polytechnique et se sont retrouvés en avril 2015 pour démarrer Lefty. Thomas (ex. GlaxoSmithKline marketing et ventes) s’occupe de la commercialisation de l’offre, tandis que Christian (ex. Google Search) est le directeur technique et Roman (ex. fonds d’investissements) dirige les opérations. Les campagnes d’influence sont un marché en vogue, mais elles sont difficiles à activer pour les marques. L’identification d’influenceurs pertinents reste un challenge, surveiller leur contenu et entretenir une relation personnalisée avec eux demande du temps et de l’expertise. Lefty lève ces difficultés pour ses clients, en accompagnant les marques dans la conception et la mise en place de leurs campagnes de marketing influenceur sur les réseaux sociaux. Puisant dans notre base de données répertoriant 3 millions de profils dans le monde (dont plus de 40 000 en France), notre algorithme de matching identifie les influenceurs les plus pertinents pour nos clients selon leur influence, l’engagement qu’ils suscitent, leurs centres d’intérêt, leurs collaborations passées, la qualité visuelle de leurs posts et leur audience. Nous les activons ensuite dans des stratégies impactantes et cohérentes sur le long-terme, qui vont renforcer l’image de la marque.

-Air of melty : Quels sont les avantages d’une stratégie de marketing d’influence pour les marques aujourd’hui ?

L : Les influenceurs sont omniprésents; nous estimons qu’ils représentent aujourd’hui 30% de tout le contenu consommé sur les réseaux sociaux – ils constituent ainsi un inventaire considérable sur lesquels les marques peuvent s’appuyer. Les réseaux sociaux étant majoritairement utilisés sur mobile, le marketing d’influence est donc une des meilleures solutions pour atteindre leur cible sur ce support. Plus humain et authentique, il améliore l’image des marques auprès d’audiences de moins en moins réceptives à la publicité traditionnelle, convertissant ainsi 4 à 10 fois plus. Preuve de son succès : il est déjà utilisé par 2 annonceurs sur 3. Il reste cependant encore beaucoup à faire pour transformer cette chaîne de communication aujourd’hui considérée comme tactique en un canal faisant partie intégrante du mix marketing.

-Air of melty : Qu’est-ce qui a changé dans le marketing d’influence ces douze derniers mois, sur le fond et sur la forme ? Assiste-t-on à une demande de transparence et d’authenticité de plus en plus forte de la part des consommateurs ?

L : Sur un marché récent et en forte croissance (+90% trimestre 2017 par rapport au 1er trimestre 2016 – source Lefty), le marketing influenceur évolue rapidement, aussi bien pour les marques, que les influenceurs et les consommateurs. On remarque quatre changements majeurs : d’une part, la professionnalisation des influenceurs. Les influenceurs, moins rémunérés qu’aujourd’hui, étaient traditionnellement utilisés pour leur reach afin de promouvoir des marques qui n’avaient parfois pas de lien avec leur ligne éditoriale. Le marché est désormais beaucoup plus professionnel : les influenceurs considérés comme de véritables médias sont payés en conséquence. Deuxièmement, on assiste à une éducation des audiences : les audiences sont de plus en plus exigeantes envers le contenu qu’elles consomment. Les influenceurs faisant des collaborations loin de leur univers éditorial se font reprendre par leurs abonnés. Ces publications sont sanctionnées par 50% d’engagement de moins en moyenne que leurs posts habituels. Comme leur crédibilité est remise en question, nous imaginons qu’à terme, ce genre de posts sera voué à disparaître. Troisièmement, les agences de réglementation publicitaire et les plateformes s’engagent davantage à lever le voile sur les publications sponsorisées. Michael Ostheimer, responsable de la division de surveillance des pratiques commerciales de la FTC (l’autorité américaine de défense des consommateurs), déclare ainsi “avoir lutté contre les publicités déguisées pendant des décennies et selon nous, les réseaux sociaux sont un nouvel endroit où elles apparaissent”. L’une des affaires les plus connues concerne la Warner Bros et le célèbre Youtubeur PewDiePie, qui aurait réalisé des démonstrations assorties de critiques positives du jeu Middle Earth : Shadow of Mordor sans jamais mentionner être rémunéré pour le faire. Epinglé par la FTC, le studio a conclu un accord à l’amiable et s’est engagé à signaler toute future campagne sponsorisée. Enfin, on note l’émergence des micro-influenceurs, ces comptes suivis par moins de 20 000 abonnés et qui sont considérés comme plus crédibles et frais, car, bien que de plus en plus sollicités, ils ne sont pas encore noyés sous les demandes des marques.

-Air of melty : En quoi le marketing d’influence est-il particulièrement efficace auprès de la jeune génération ?

L : Représentant 61% des comptes sur Instagram, les moins de 30 ans font davantage confiance aux recommandations de leurs pairs qu’à toute forme de publicité. Il est donc pertinent pour les marques de se tourner vers les individus qui sont le plus suivis et écoutés, les influenceurs, pour adresser leur message à cette audience. Prenons pour exemple la chaîne d’hôtellerie Marriott, qui a créé en avril dernier une mini série aux codes Snapchat, pour présenter à cette audience jeune les avantages de faire partie du programme de fidélité Marriott. 4 influenceurs (Jen Levinson, Tom Jauncey, Sara Hopkins et Diipa Khosla) ont chacun invité leur communauté à les suivre lors de leurs aventures excitantes aux quatre coins du monde (Berlin, New York, Seoul et Dubai respectivement), dans un format nouveau inspiré des réseaux sociaux.

-Air of melty : Un mot sur la nouvelle fonctionnalité d’Instagram, à savoir la mention qui sera affichée en haut des posts sponsorisés par une marque ? Que traduit-elle ? D’autres outils de ce genre sont-ils à attendre sur tous les réseaux sociaux ?

L : Nous estimons que les annonceurs dépensent 25% de leur budget de communication sur Instagram en marketing influenceur. Cela représente une opportunité trop importante pour être ignorée par le réseau social. Jusqu’à présent, les annonceurs ont pu laisser planer le doute sur la nature du partenariat avec l’influenceur : dans le meilleur des cas, il mentionnait le hashtag #ad ou #collab, mais très souvent, la nature rémunérée de la collaboration était passée sous silence. Instagram prend une décision fondamentale avec cette nouvelle fonctionnalité, qui va systématiquement lever l’ambiguïté sur la relation entre la marque et l’influenceur et la rendra transparente pour son audience. Grâce à une mention en haut du post sponsorisé, l’annonceur aura accès à toutes les statistiques de la publication (vues profil, nombre d’impressions, taux d’engagement, etc.) – autant d’insights pour affiner sa stratégie de communication. Cette mesure répond au besoin de transparence de l’audience, en rendant visible pour tous ces posts sponsorisés. Les influenceurs vont surement craindre de perdre en engagement. Ils seront plus exigeants dans le choix de leurs partenariats, ce qui résultera en des publications de plus grande qualité et un renforcement des relations avec leurs abonnés. Le cadre juridique de ce marché est en train de se mettre en place. On peut donc s’attendre à ce que ce genre d’outils se développent à l’international et sur d’autres réseaux sociaux.

-Air of melty : Sur quel type d’influenceur vaut-il mieux miser aujourd’hui : micro-influenceur, influenceur de niche ou influenceur déjà populaire ? Un choix à faire bien plus complexe que cela ?

L : Il n’y a pas de règle pré-établie pour choisir un influenceur, macro, micro, influenceur de niche… L’essentiel est d’identifier le bon profil d’influenceur en fonction de ses objectifs, du concept de la campagne et de l’image de marque. Le message est aussi important que la personne qui l’incarne : il doit raconter une histoire, atteindre les émotions de l’audience pour l’engager. Bien évidemment, les profils de micro-influenceurs sont les plus nombreux. Nous dénombrons plus de 40 000 influenceurs en France, dont 80% sont suivis par moins de 20 000 abonnés. Ces influenceurs qui maintiennent des relations souvent plus personnelles avec leur audience commencent à être favorisés par les marques. Cependant, pour atteindre un reach important, il faut en coopter un grand nombre dans la campagne. Et en démultipliant les contacts, la complexité et le temps passé à nouer des relations avec les influenceurs augmentent forcément. Le nombre d’abonnées n’est pas le seul critère. L’engagement d’un influenceur, la qualité de ses contenus et son affinité avec la marque ont davantage de valeurs. Le taux d’engagement, qui se calcule en divisant le nombre de réactions suscitées par un post (like, commentaires, partages) par le nombre d’abonnés, est un nombre clé visant à décrire la force du lien d’une audience pour un influenceur. Et contrairement à une idée préconçue, le taux d’engagement moyen ne varie pas avec le nombre d’abonnés, il est en moyenne de 1,9%, quelque soit la taille de l’audience. Nous considérons comme exceptionnel un taux d’engagement supérieur à 5% et nous évitons les taux inférieurs à 2%. L’important est l’adéquation entre l’influenceur, sa communauté et la marque, pour que le message soit efficace.

-Air of melty : De façon générale, quels sont les ingrédients à privilégier et les erreurs à éviter dans une stratégie de marketing d’influence en 2017 ?

L : Voici quelques conseils à appliquer pour réussir sa campagne d’influence : Le concept doit à la fois porter des valeurs et avoir un ton cohérent avec l’image de marque mais aussi toucher l’audience émotionnellement pour créer un lien direct avec elle, gagner en impact et convertir davantage. Par ailleurs, le choix de la plateforme est capital. Instagram est le réseau le plus généraliste pour toucher les audiences les plus larges. Youtube est adapté aux formats longs pour expliquer un concept ou un produit. Enfin Snapchat est idéal pour toucher une audience jeune. Aussi, l’identification des influenceurs est très importante. Ils doivent être en ligne avec l’image de marque pour toucher la bonne audience. Ils doivent aussi être choisis pour la qualité de leurs contenus, ce qui assure l’engagement. Il est également très important de bien inclure l’influenceur dans le projet, il se sentira d’autant plus valorisé et le contenu produit sera plus proche de sa ligne éditorial et donc plus authentique. Enfin, il est indispensable de définir les indicateurs à suivre en amont de la campagne en fonction des attentes et des objectifs de la marque.