Marketing Mobile : Renaud Ménérat, « Pour s’adresser aux jeunes, il faut adopter une stratégie ‘Mobile First’, voire ‘Mobile Centric’ » (EXCLU)

Par Céline Pastezeur - Publié le 15 Oct 2014 à 13:24
Le mobile est un outil marketing puissant à bien des égards !
Le marketing mobile, eldorado des marques qui veulent s’adresser aux jeunes ? Une étude publiée en début de semaine a confirmé la tendance : la génération Y, accro au mobile, est de plus en plus intéressée par le m-commerce. Pourquoi et comment les marques doivent-elles se servir du mobile pour séduire les jeunes consommateurs ? Renaud Ménérat, Président de la Mobile Marketing Association France, a accepté de répondre à nos questions.

En début de semaine, Air of melty vous annonçait que les 25-34 ans représentent aujourd’hui un quart du total des acheteurs mobiles en France, soit une cible claire à privilégier et à engager ! C’est en tout cas le constat que fait la Mobile Marketing Association, qui a communiqué ces chiffres, dégotés par l’institut Comscore. Renaud Ménérat, Président de la Mobile Marketing Association France (MMAF), a accepté de répondre à nos questions, afin de mieux comprendre le rapport entre jeunes, mobiles et marketing.

-Aujourd’hui, à l’heure où les 25-34 ans représentent un quart du total des acheteurs mobiles en France, quel type de marketing mobile les marques doivent-elles adopter ? Cette cible a-t-elle des attentes différentes en matière de marketing mobile par rapport à ses aînés ?

Les 25-34 ans représentent la première génération de ‘digital native’, les premiers « enfants de l’Internet » (par opposition temporelle aux enfants de la TV dont je suis…). Ils ont donc un réflexe digital naturel, quelle que soit la taille de l’écran, et du coup une adoption plus rapide des usages comme l’achat depuis une téléphone mobile. Mais cette génération est déjà challengée par les « Millenials » (nés après l’an 2000) et qui font eux du mobile (smartphones, tablettes) le pilier de leur divertissement, de leur culture et de leur relation avec les marques et les médias. Près d’un utilisateur de Facebook sur deux n’accède au service que depuis un Smartphone. Et c’est déjà le cas d’un acheteur sur trois chez Amazon. Cette génération sera celle de l’ère post-PC qui ne connaîtra les ordinateurs que dans un contexte professionnel, et encore ! Les attentes et exigences de ces consommateurs sont ainsi plus fortes – en terme de fonctionnel, d’ergonomie, de design et de qualité technique – car ce sont aussi de très gros utilisateurs d’applications et de services mobiles. Pour les entreprises cela signifie qu’il faut adresser cette cible avec une stratégie « mobile first » voire « mobile centric » ! La présence de la marque sur mobile ne doit pas juste être une version dégradée du site web, avec moins de chose, mais au contraire, raconter une autre histoire, prenant en compte les contextes et fonctionnalités des Smartphones. Les directions marketing doivent désormais penser leur stratégie en mettant le mobile au cœur du dispositif, avec une vraie notion de service. Le mobile devient de plus en plus un assistant personnel et les marques doivent s’insérer dans cette relation pour répondre aux attentes. Des applications comme Go McDo ou Starbucks sont de belles illustrations de cette approche et qui génèrent un réel usage. 50% des commandes à distance se font depuis le mobile chez McDonald’s et plus de 10% des paiements effectuées chez Starbucks se font à partir du mobile aux USA.

-La tendance est fortement au marketing personnalisé. Celui-ci peut-il trouver sa place sur le mobile ?

Le mobile est par essence le média le plus adapté au marketing personnalisé, dit « one to one ». Outil personnel par excellence, toujours connecté en 3G ou en WiFi, il accompagne le consommateur 16 heures par jour, n’importe où, n’importe quand. Il risque ainsi de devenir rapidement le premier vecteur de collecte de données sur un consommateur. En agrégeant les informations de géolocalisation, d’achat (à distance ou en point de vente), d’usage des autres applications, de données issues des réseaux sociaux,etc, le marketing va collecter une masse de données (la fameuse Big Data) sans précédent. Avec un objectif en tête : déclencher des actions marketing « temps réel », voire de marketing prédictif en anticipant les besoins des consommateurs. C’est le cas de Google Now par exemple qui, en agrégeant un certain nombre de données sur vous, via votre compte gmail, votre usage du moteur de recherche Google, de la cartographie Google Maps ou encore de votre Google Wallet commence à vous proposer de manière proactive des informations totalement personnalisées. C’est d’une certaine manière le rêve des directions marketing. Mais pour ne pas le transformer en cauchemar, il faudra notamment être très rigoureux sur l’accord et l’information préalable à la collecte et surtout sur l’usage et la protection des données consommateurs. La confiance sera un élément important de l’adoption de ces services, même si la nouvelle génération, très habituée aux réseaux sociaux, semble plus ouverte sur le sujet que leurs ainées.

-Il y a quelques mois, une étude de Médiamétrie affirmait que les jeunes sont plus ouverts à la publicité mobile que leurs aînés. Etes-vous d’accord avec cette hypothèse ?

Oui bien sûr. Les nouvelles générations ont bien compris le deal qu’offre l’Internet, et comme le disait un journaliste, « si le produit est gratuit,… c’est que tu es le produit ». Il y a donc une acceptation plus facile de la publicité (ou de la collecte de données) en échange de la gratuité du service. 90% des applications téléchargées sont gratuites et fonctionnent sur un modèle marchand (vente de produits) ou publicitaire. La crise joue également certainement un rôle, et étend cette tendance à l’ensemble de la population. Le succès de VentePrivée.com et de la recherche de bons plans, le développement de la sharing economy et de Blablacar dans le co-voiturage sont de bons exemples de cette tendance de fond.

-La vidéo mobile sera-t-elle la tendance forte de 2015, ou vous attendez-vous à l’essor d’un autre genre de marketing mobile ?

Sur les formats publicitaires mobiles, la vidéo est effectivement en forte croissance, comme dans la publicité digitale en général (la publicité vidéo est en croissance de 34% sur S1 2014, contre seulement 3% pour la publicité digital dans son ensemble). Une croissance renforcée par le succès des applications vidéos sur Smartphones : YouTube est ainsi la première application mobile en France avec plus de 12 millions de visiteurs uniques (Médiametrie – juillet 2014). D’autres formes de publicité mobile devraient se développer en 2015, notamment via des push notification géociblées basées sur des bornes Bluetooth (iBeacon chez Apple) déployées dans les points de vente et visant à faire venir et à guider les consommateurs.

-Quid des coupons et bons de réduction digitaux, très demandés par les jeunes ? Peuvent-ils trouver leur place sur le mobile ?

Comme je le disais précédemment, le bon plan est au cœur des préoccupations des Français, avec le « acheter malin ». Là encore le mobile a une place toute trouvée ! En permettant au consommateur de réagir immédiatement à des ventes privées, des ventes Flash (35% des ventes de Vente-Privee.com proviennent désormais du mobile) et, ensuite, en permettant de découvrir les bons plans disponibles autour de soi. Des acteurs comme Pages Jaunes ou Vente Privée se positionnent sur l’agrégation de bons plans géolocalisés, avec une nécessité d’attendre rapidement à la fois une masse critique de bons plans et de consommateurs pour créer un cercle vertueux. Enfin, le mobile a une place toute trouvée en permettant de stocker dans son téléphone et de présenter dans ses enseignes préférées les bons de réduction traditionnellement en papier, notamment via le système Passbook d’Apple. Tout ça en attendant d’effectuer également son paiement en sans contact, via la NFC introduite par Apple dans son dernier iPhone et qui devrait se démocratiser dès 2015.