RichRelevance, « La jeune génération est plus à l’aise avec le consumérisme » (EXCLU)

Par Céline Pastezeur - Publié le 18 Juin 2015 à 10:59
Le magasin du futur se dévoile !
On le sait, les jeunes sont très demandeurs d'innovations en tout genre dans leur quotidien. Mais en va-t-il de même dans leur parcours d'achat ? A l'heure où la technologie débarque en force dans les magasins, Antoine Leven, responsable clientèle chez RichRelevance, dont le rôle est de conseiller les clients de la firme dans leurs initiatives de personnalisation et dans la mise en place de solutions, s'est confié à nous pour évoquer un sujet capital : comment les jeunes se comporteront dans le magasin du futur. Réponse par ici.

Il y a quelques heures à peine, la rédaction d’Air of melty vous expliquait en quoi le jeune constitue aujourd’hui un meilleur shopper que ses aînés. Cela, c’est pour aujourd’hui. Et pour demain alors ? Ces derniers mois, de nombreuses innovations, telles que les miroirs « intelligents » à l’essai aux Etats-Unis, ambitionnent de révolutionner l’expérience shopping des jeunes. Antoine Leven, fort de quinze années d’expérience dans le marketing digital et responsable clientèle chez RichRelevance, éditeur proposant à plus de 200 clients dans le monde d’optimiser le commerce multi-canal, nous dit aujourd’hui tout sur le rapport de la jeune génération au magasin du futur. Les innovations en tout genre, c’est cool ou intrusif ? Réponse par ici !

-Air of melty : L’étude dévoilée il y a quelques semaines montrait que « les clients apprécient les promotions et les informations pertinentes quand ils sont à la recherche d’un produit ou dans le processus d’achat ». Cela est-il vrai spécifiquement pour la jeune génération ? Comment cela s’illustre-t-il ?

Antoine Leven, responsable clientèle chez RichRelevance : Globalement, ce que disent les données concernant la tranche d’âge des 18-29 ans, c’est que, pour ce qui est considéré comme accepté, leur acceptation est plus grande et que, pour ce qui est moins accepté, leur taux de rejet est plus faible. Il y a donc un côté amplificateur dans un sens comme dans l’autre. Mais sur certaines choses, comme le fait qu’on vous accueille avec votre nom quand vous arrivez dans la magasin, l’acceptation est différente. De manière générale, tout ce qui est fait pour aider le client (promotions, géolocalisation dans le magasin, etc) est bien accepté en général et est encore mieux accepté par les jeunes générations. Il y a plus d’enthousiasme, plus d’ouverture.

-Est-ce aussi le cas pour les cabines d’essayage numériques ou la personnalisation des prix, jugées plutôt intrusives par l’ensemble de la population ?

A.L : Effectivement, le taux d’acceptation de ces deux innovations est également plus élevé au sein de la jeune génération. Par exemple, les jeunes sont 35% à trouver cool le fait d’avoir affaire à des prix personnalisés, tandis que le taux chute à moins de 20% pour les plus de 60 ans. De même, les cabines d’essayage numériques sont jugées cool par plus de six jeunes sur dix, contre moins de la moitié des sondés pour le reste de la population.

-L’étude porte sur le marché anglo-saxon. Pensez-vous que les mêmes tendances émergeaient dans le cas d’une étude française ?

A.L : Mon intuition, c’est que la jeune génération constitue une clientèle similaire entre le Royaume-Uni et la France. Par contre, les marchands sont plus avancés au Royaume-Uni qu’en France. Mais ce n’est qu’une avance de quelques mois, selon moi. Il y a une mentalité associée à l’innovation et à la prise de risque qui est plus présente à l’étranger mais qui commence à arriver en France. Je suis convaincue que les innovations présentées dans l’étude de RichRelevance trouveraient un écho auprès de la jeune génération française. Le public est bien plus en avance dans les usages et la technologie que les marchands, et cela se vérifie d’autant plus auprès de la jeune génération. Le digital est arrivé en magasin via les (jeunes) clients qui viennent avec leur mobile.

-Comment expliquer le fait que les jeunes utilisent tant la technologie dans leur parcours d’achat ?

A.L : La jeune génération est plus à l’aise avec le consumérisme. Cela ne veut pas dire qu’elle ne vit que par ça, loin de là, mais je pense qu’elle a beaucoup plus de discernement. Elle perçoit moins comme une agression le fait qu’on lui propose un produit supplémentaire, par exemple. Si elle n’en veut pas, elle sait dire non. Pour ma génération, et encore plus celle qui me précède, c’est considéré comme étant impoli de refuser un produit que l’on nous propose en magasin. D’autre part, la jeune génération est aussi beaucoup plus familière que ses aînés avec la technologie digitale, qu’elle s’approprie plus facilement. Elle est moins suspecte de ce qui se passe derrière tout cela, se laisse moins bercer par les fantasmes autour des données.

-Comment associer technologie et personnalisation, à l’heure où les jeunes réclament des expériences uniques à l’égard des marques ?

A.L : Il est clair que les jeunes sont plus sensibles que l’ensemble de la population à l’idée de personnalisation. Avec la technologie, ils sont plus sollicités par tout ce qui est emails, SMS, offres en tout genre. Donc ce qu’ils attendent, c’est que ce soit au moins adapté à leur profil, que l’offre soit pertinente et les concerne ! Personnaliser le parcours du consommateur dans l’e-commerce comme dans le commerce traditionnel, cela permet de générer du chiffre d’affaires complémentaire, c’est indéniable. Mais si les techniques de personnalisation sont les mêmes pour tous les magasins, il n’y a plus vraiment de personnalisation. Chaque marque doit définir la relation qu’elle veut avoir avec son client et faire en sorte que ses clients se créent leur propre expérience. L’acte d’achat n’est pas aussi glamour qu’on le pense, on est quand même loin de l’ambiance Pretty Woman. Il faut que les marques respectent le consommateur et se rendent compte que ce n’est pas un acte gratuit de se rendre en magasin.

-Quelles sont les limites entre une innovation estimée « cool » et une innovation jugée intrusive, dans l’esprit des jeunes ?

A.L : L’aspect fonctionnel est très important : tout ce qui n’a pas de réelle valeur, qui est surfait et qui n’apporte rien de concret pour faciliter la démarche d’achat du consommateur, ça ne passe pas. Quelque chose d’artificiel, qui n’est pas vraiment nécessaire, ça ne passe pas. La géolocalisation dans le magasin, c’est utile. On le voit dans le fait que 62% des jeunes l’acceptent contre 43% pour l’ensemble de la population. A l’inverse, le fait que le vendeur nous appelle par notre prénom dès notre arrivée dans le magasin, ça n’est pas utile et les chiffres le montrent également. Mais le rejet est moindre car les jeunes font le tri eux-mêmes. Ils sont mieux armés que les autres générations face à tout cela. Ils ne sont pas dupes, ils ont affaire à une multitude d’informations au quotidien, c’est le monde dans lequel ils vivent.

-Comment le mobile, outil si indispensable pour la jeune génération, peut-il s’inviter dans le magasin du futur pour s’imposer toujours plus comme un outil cool ?

A.L : Une des données de l’étude récemment publiée par RichRelevance, c’est que 88% des jeunes apprécient le fait de scanner un produit avec leur mobile pour avoir accès à des critiques et à des recommandations qui pourraient leur plaire. Le chiffre est nettement moins élevé pour les générations suivantes. Avec le mobile, les jeunes sont plus à même de vérifier le prix d’un produit et de voir s’il n’est pas moins cher ailleurs. Ils se servent de la technologie en mode système D pour chercher de l’information pour faire l’achat le plus intelligent. Cela devient de la pratique de consommateur. En cela, tout magasin qui n’a pas de wifi se tire une balle dans le pied. Et si, en plus, ce même magasin n’a pas d’application ou de site mobile, il se tire une balle dans l’autre pied ! Si vous ne permettez pas aux jeunes de naviguer correctement vers votre offre, ça revient à leur dire « Allez voir ailleurs ». Heureusement, ça commence à évoluer, on sort de l’ère de la Préhistoire.