Tribe : Cyril Paglino, « La barrière à la création-consommation de vidéo est nulle pour la jeune génération » (EXCLU)

Par Céline Pastezeur - Publié le 08 Déc 2016 à 11:49
Cyril Paglino nous présente le phénomène Tribe.
Alors que la vidéo s'impose comme le nouveau format privilégié de tous les réseaux sociaux, l'application de messagerie Tribe, se donne l'ambition de l'inviter toujours plus dans les conversations privées. La vidéo, bientôt plus fort que le texto ? Cyril Paglino, fondateur de l'application, nous donne les raisons d'y croire.

C’est un fait, ces derniers mois, Snapchat, Facebook et Instagram ont misé en force sur la vidéo pour faire évoluer leurs réseaux sociaux. Mais, qu’on se le dise, ce format devrait aussi connaître un essor toujours plus fort dans les conversations privées. C’est en tout cas l’ambition que se donne Tribe, une nouvelle appli de messagerie que nous vous avions présentée il y a quelques temps. Aujourd’hui lancé, le service compte plus de 500 000 utilisateurs et plus de 50 millions de messages échangés, notamment chez les millennials, qui l’utilisent jusqu’à 20 fois par jour. Phénomène en vue, décrypté par Cyril Paglino, son fondateur.

-Air of melty : Comment est née l’idée de Tribe ? Est-ce venu du sentiment d’un manque sur le marché des apps, une envie de faire quelque chose de différent ?

Cyril Paglino, fondateur de Tribe : En 2015, Periscope venait de se lancer, et Facebook Live est arrivé juste après. Dans le même temps, la croissance des « stories videos » de Snapchat était impressionnante. Il était donc clair que le format video prenait de plus en plus de place dans les contenus web. Si vous regardez les usages consommateurs de ces 10 dernières années versus les évolutions technologiques, c’est une évidence : la vidéo explose. Concrètement, aujourd’hui, on est en train de passer d’un web composé de « text & photo » à un web composé de vidéo. Le seul secteur qui n’a pas encore été transformé par la vidéo est la messagerie : depuis 15 ans, elle est « text-based », comme l’illustrent entre autres iMessage, Messenger, Whatsapp ou encore WeChat. On a eu envie de se concentrer sur ce sujet et de créer un produit qui nous plait, qu’on utiliserait, nous, tous les jours.

-Air of melty : Comment fonctionne l’application concrètement ? L’ambition est-elle de faire de la vidéo express le nouveau SMS ?

C.P : L’application comporte 1 seul écran, rempli de carrés. Chaque carré est un contact. Dès que vous voulez parler à un contact, vous appuyez sur sa photo, et l’enregistrement de la vidéo démarre alors. Tant que vous continuez d’appuyer, la vidéo continue de s’enregistrer. Et dès que vous lâchez votre doigt, la vidéo s’envoie. Tout simplement. Concernant notre ambition, c’est un fait, le SMS est un format qui restera, bien évidemment. Aujourd’hui, si l’on prend la totalité des messages envoyés par jour, cross plateformes (SMS, iMessage, Whatsapp, Messenger…) comprises, c’est 96% de textes contre seulement 4% de vidéo-audio. On pense toutefois que, peu à peu, cette tendance va s’inverser. La vidéo ne remplacera jamais totalement le SMS, mais elle va tout de même prendre une place importante dans nos conversations au quotidien.

-Air of melty : En quoi cela répond particulièrement à une exigence de la jeune génération ? Elle ne veut plus du texto ?

C.P : J’ai 30 ans et je suis né dans cette « text based generation » qui a appris à se servir d’un ordinateur avant un mobile et qui a toujours connu le clavier. Aujourd’hui, les claviers mobiles ont disparu et les smartphones ont des caméras de haute qualité. Quelqu’un qui a 15 ans aujourd’hui a découvert internet via son smartphone et a eu accès à une caméra dès son plus jeune âge. La barrière à la création-consommation de vidéo est nulle pour la jeune génération. Et ça va ne faire qu’augmenter. C’est le sens de l’histoire.

-Air of melty : Alors que le live est en plein essor sur tous les réseaux sociaux, votre utilisation de la vidéo semble prendre une autre direction. Vous pouvez nous en dire plus ?

C.P : Le live explose sur la partie « public », qu’on appelle Broadcast, au travers de Periscope et Facebook live notamment. Sur Snapchat aussi, quand vous postez une vidéo ou une photo, vous l’envoyez dans plus de 85% des cas à tous vos amis via les stories. Mais sur la partie Messaging, le live ne trouve pas sa place. Pour la simple et bonne raison que le Live est fun, riche, mais anti-pratique. La vidéo live a aussi ses limites : on doit être live, disponibles en même temps. Etre sur la même timezone. Chez Tribe, on construit la plateforme de messagerie de demain. Celle qui vous permet de parler a vos proches à tout moment (100% asynchrone), plus rapidement que jamais (puisque parler prend moins de temps que de taper sur un clavier) et avec bien plus d’émotions (une vidéo = voix, mais aussi sourire, image). Cela concerne tout le monde. C’est juste une question de temps.

-Air of melty : Sur Tribe, les vidéos durent 15 secondes maximum. Peut-on dire que l’on est vraiment dans une ère de micro-vidéo consommées à la chaîne plutôt qu’une longue vidéo de temps en temps ?

C.P : On a effectivement débuté avec 15 secondes. On pensait pendant longtemps que c’était le bon format. Aussi pour des raisons techniques. Mais on a finalement changé d’avis et récemment décidé d’allonger un peu la durée, qui va jusqu’à 60 secondes maximum désormais.

-Air of melty : Comment prévoyez-vous de monétiser le service ?

C.P : Pour l’instant, monétiser Tribe n’est pas du tout dans nos priorités. On essaye avant tout de construire la meilleure expérience mobile possible. Cela prend du temps.

-Air of melty : Enfin, alors que 2016 touche à sa fin, quelle est votre ambition pour 2017 ?

C.P : La priorité, c’est de continuer de s’amuser tous ensemble. On est en pleine construction de l’équipe (11 personnes aujourd’hui). On a des gens de chez Zynga, Apple, Google, Twitter qui nous rejoignent, avec des expériences diverses et passionnantes. On continue de s’entourer des meilleurs et d’avancer, step by step, sur la mission qu’on s’est fixée. De nombreux chantiers nous attendent encore dans les prochains mois. Pour en citer deux, je dirais le challenge technique, bien évidemment, mais aussi le challenge humain : attirer et recruter les meilleurs talents.