Disko, “Instagram tente de casser ce phénomène qui pousse les utilisateurs à idéaliser leur vie et à en valoriser l’aspect superficiel” (Tribune)

Par Céline Pastezeur - Publié le 12 Fév 2020 à 12:41
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Parce qu'Instagram s'impose comme étant un réseau social incontournable en cette année 2020, Charlotte Le Petit, Consultante Social Media au sein de l'agence de communication Disko, vient de rédiger une tribune qui s'intéresse aux dessous de cette plateforme super puissante.

En ce début d’année 2020, Instagram s’impose comme étant le réseau social préféré des 15-25 ans, devant Facebook, Snapchat et compagnie. Ce qui a cartonné au mois de janvier sur le réseau social détenu par Facebook et dédié à l’image, ce sont les filtres quizz et les hashtags associés à des bonnes résolutions. À l’heure où près de 8 jeunes sur 10 se connectent régulièrement sur Instagram, Charlotte Le Petit, Consultante Social Media au sein de l’agence de communication Disko, vient de dévoiler une tribune mettant en lumière les dessous du réseau social. L’occasion de voir que la plateforme se trouve actuellement à un véritable tournant. Découvrez cette tribune ci-dessous.

Instagram est soumis à des algorithmes variables, qui ne plaisent pas forcément à tout le monde. L’avant dernière mise à jour de l’application a eu pour effet de réduire considérablement la visibilité du contenu dans le fil d’actualité de ses abonnés. On estime maintenant que seulement 10% de nos abonnés verront nos publications, ce qui pose problème, aux influenceurs notamment qui voient le nombre de « likes » de leurs publications chuter. La course aux likes est déclarée. Aujourd’hui, Instagram tente de casser ce phénomène qui pousse les utilisateurs à idéaliser leur vie et à en valoriser l’aspect superficiel.

Les réseaux sociaux, ce n’est pas la vraie vie !

Beaucoup de comptes Instagram nous font rêver jusqu’à nous faire penser que notre propre vie est banale et sans intérêt … On y voit de beaux paysages, des modèles sublimes, des couples qui vivent des vies parfaites, et en prime, des tonnes de likes et commentaires positifs. Et oui ! Bienvenue dans le monde merveilleux d’Instagram où il suffit de partager ses meilleurs clichés pour exister. Pour beaucoup, Instagram est devenu une véritable drogue, un outil inlassablement présent dans leur vie quotidienne. Cela n’échappe à personne : au réveil, dans les transports, ensuite au bureau, en mangeant, quand on s’ennuie, puis le soir avant de se coucher. Le scrolling fait partie de notre vie … On fait défiler notre fil d’actualités sans même vraiment regarder ce qui s’y trouve.

Il y a quelques années, on raillait encore les personnes qui racontaient leur vie sur Facebook, alors qu’aujourd’hui exposer sa vie sur Instagram est devenu partie intégrante de notre quotidien. Plus personne ne va au restaurant sans partager des photos de son plat, les utilisateurs sont même fiers de partager les bêtises de leur chat ou encore leur dernière manucure avant l’été. En se promenant sur Instagram, on tombe ainsi sur de nombreux clichés mettant en scène des abdos sexy ou de jolies jambes fines et bronzées sur une plage ensoleillée. Ne soyez pas trop vite jaloux. Et oui, derrière cette photo se cache une réalité nettement moins idyllique.

On a souvent tendance à croire tout ce que l’on voit sur Instagram mais la réalité derrière une photo peut s’avérer à des années-lumière de ce que l’on imagine. Il suffit d’un filtre ou d’une légende qui fasse envie, et hop, on nous fait rêver à tort. Idéaliser sa vie est vraiment très, voire trop facile, sur les réseaux sociaux. Heureusement, il y a des vidéos pour nous rappeler ce qui se cache derrière tous ces jolis clichés. La chaîne YouTube Ditch the Label a notamment publié une vidéo qui démontre de manière très explicite que l’on peut faire croire ce que l’on veut à qui l’on veut. Il y a quelques temps, une vidéo intitulée « Hashtag No Filter » a également fait le buzz en dénonçant la part sombre d’Instagram.

Les dégâts d’Instagram et des réseaux sociaux

Pour certains d’entre nous, les réseaux sociaux prennent une importance telle qu’ils vont jusqu’à déterminer le contenant de notre valise pour partir en vacances (oui, vous aussi les hommes, ne le niez pas). Le cas de la valise est un exemple fort, on s’est tous déjà retrouvés confrontés au pouvoir de la superficialité. Ainsi, pour dix jours de vacances, on peine à fermer nos valises. Ce n’est pas deux paires de chaussures qu’il nous faut mais bien une pour chaque soir au moins ! Plus personne n’ose partir avec seulement 1 pantalon, deux t-shirts, un maillot de bain et deux paires de chaussures.

Et pourquoi ? On ne fait plus notre valise pour nous mais pour les autres. Tout ça pour éviter ce genre de réflexion en vacances : «J’ai déjà posté une photo avec cette robe, je ne peux pas la remettre tout de suite, sinon les gens vont croire que je m’habille toujours de la même façon ». Sans que l’on s’en rende compte, au fil du temps, les réseaux sociaux se mettent à dicter nos vies. A force d’apercevoir certaines choses chez les autres, on en vient à vouloir les posséder. On a tous déjà acheté une paire de baskets blanches repérée sur le compte de l’influenceuse qu’on adore, ou cette casquette portée par untel, vue sur le post du 7 mars à 8h en allant au travail.

On dépense des sommes astronomiques en vêtements pour les montrer aux autres et s’exhiber sur les réseaux sociaux. Mais le plus ironique dans tout ça ? C’est que finalement, plus on est dévêtu et plus on obtient de likes.Alors, à quoi bon s’habiller sérieusement ? La vraie question à se poser est : pourquoi avons-nous besoin d’exposer nos vies comme ça ? Pourquoi ? Tout simplement pour être dans l’air du temps, et surtout, pour se sentir exister, à travers l’image que l’on diffuse et le retour que l’on en obtient. Et, de fil en aiguille, on en vient à être réduit à se dire que si on ne porte pas cela, si on ne va pas à tel endroit, ou si on ne teste pas ça… C’est qu’on a loupé sa vie.

Instagram toujours plus loin vers la superficialité

Instagram fait régulièrement des mises à jour de son application, faisant parfois trembler les utilisateurs. On a eu le droit à la suppression de la page “abonnés” qui permettait d’espionner les faits et gestes de son crush ou encore de son ex. Ensuite, il y a eu l’Instagram version verticale, plus gros flop de toute l’histoire (d’ailleurs, seul les plus accros d’entre nous s’en souviennent !). La dernière en date consiste à supprimer le nombre de likes pour éviter cette course à la mise en scène et donc à la superficialité. Mais est-ce vraiment le cas ? Pas vraiment car aujourd’hui encore, on continue d’innover dans la mise en scène d’une vie idyllique et dans le monde du paraître. Vous pouvez dès à présent louer un petit-ami pour une journée, et faire de belles photos de couple pour vos réseaux sociaux. On appelle ça un « Instagram Boyfriend », concept créé par une agence de voyages italienne, Roma Experience. Dans quel intérêt ? Montrer à sa communauté qu’on passe des vacances hyper cool et super romantiques à Rome avec son « mec », ensuite il n’y a plus qu’à prendre un maximum de photos et les poster dans son feed. Tout ça pour quoi ? Donner l’illusion de vivre une love story incroyable.

Et maintenant ?

Instagram a décidé de mettre fin à “la guerre des likes”. Nous allons entrer dans une nouvelle ère où le nombre de “J’aime” ne sera plus source de stress ou signe de popularité. Fin d’une pression sociale qui obligeait les utilisateurs à jauger leur niveau d’intérêt en fonction de leur nombre de likes. À présent, on pourra juger de la qualité d’un influenceur au travers de son activité avec sa communauté. Nous serons d’autant plus enclins à suivre plusieurs indicateurs, au-delà du nombre de likes seul. Un premier pas vers des interactions plus saines et un peu moins d’addiction, qui tend à nous faire penser que ces mises en scène prendront fin : enfin le retour à plus d’authenticité ?