Secteur Food : Sylvain Zaffaroni, « La génération Z est incarnée par une alimentation responsable » (EXCLU)

Par Céline Pastezeur - Publié le 07 Déc 2017 à 11:14
Secteur Food : Sylvain Zaffaroni, « La génération Z est incarnée par une alimentation responsable » (EXCLU)
Que mettent réellement les plus jeunes dans leur assiette actuellement ? Pour faire le point sur le sujet, Sylvain Zaffaroni, Défricheur et créateur d’innovations alimentaires, a répondu à nos questions pour faire le point sur le rapport de la génération Z au secteur food et à la viande notamment.

Dans tous les aspects de son quotidien, jusque dans son assiette, la jeune génération n’a pas fini de vous surprendre. Alors qu’une récente étude dévoilée par Diplomeo a mis en lumière le fait que les moins de 25 ans sont « tous veggies ou futurs veggies », Sylvain Zaffaroni, Défricheur et créateur d’innovations alimentaires qui a déjà décrypté le rapport de la génération Z au secteur food, a accepté de répondre à nos questions. Zoom sur les attentes et les envies des jeunes gourmands !

-Air of melty : « Les jeunes, tous futurs veggie », c’est le nom d’une récente étude signée Diplomeo et qui s’intéresse au fait que les jeunes sont de plus en plus nombreux à s’intéresser au régime végétatien. Quelle est l’ampleur aujourd’hui du régime végétarien au sein de la jeune génération, selon vous ?

Sylvain Zaffaroni, Co-fondateur de Cook Innov, Défricheur et créateur d’innovations alimentaires : C’est un phénomène récent qui va se développer fortement, dans les années à venir, avec une consommation croissante des protéines végétales pour deux raisons majeures pour ces nouvelles générations à la recherche de produits alimentaires bon pour la santé (« healthy ») et en phase avec le développement durable de notre planète. Rappelons une information majeure qui conditionne ce nouveau type de consommation : en 2050, nous serons plus de 9 milliards d’habitants à nourrir sur notre belle terre avec une forte urbanisation de la population. Pour répondre à cette augmentation de consommateurs, il est tout simplement impossible de continuer à développer l’élevage de viande et il est nécessaire de trouver des alternatives comme les protéines végétales et plus particulièrement les légumineuses.

-Air of melty : De façon générale, peut-on dire aujourd’hui que l’on a affaire à une jeune génération qui s’intéresse grandement à ce qu’elle mange ? Qu’est-ce qui caractérise sa consommation alimentaire par rapport à ses aînés ?

S.Z : Cette jeune génération est plus informée et plus concernée. Le fait de devoir changer notre alimentation profondément pour répondre aux enjeux précédemment cités est profondément ancré dans leur ADN. La génération X (environ plus de 40 ans aujourd’hui) n’avait pas ce rapport à l’alimentation, elle se contentait essentiellement des solutions proposées par les industries agro-alimentaires et la grande distribution. La génération Y (entre 20 et 40 ans) a commencé à être militante. Une partie, de plus en plus importante, comprend que notre alimentation est un élément indispensable à notre santé (Bio, sans gluten…) et à notre environnement (Circuits courts…). La génération Z est « incarnée » par une alimentation responsable et c’est désormais dans son ADN. De militant pour la génération précédente, c’est devenu désormais normal de manger mieux et plus sain !

-Air of melty : 47% des sondés non-végétariens ont déjà envisagé de réduire leur consommation de viande, selon cette nouvelle étude. Qu’est-ce qui fait que les jeunes se tournent vers le régime végétarien en 2017 ? Et qu’est-ce qui les retient encore ?

S.Z : Comme expliqué précédemment, ces nouveaux consommateurs ont appréhendé le fait que certains aliments comme la viande, le sucre, le lait, les produits industriels ne sont plus les bienvenus dans une alimentation saine et équilibrée. Ils se tournent donc vers une alimentation plus végétarienne mais je pense que la solution sera plutôt le « flexitarisme » qui consiste à réduire son alimentation de protéines animales au quotidien mais garde le plaisir de déguster occasionnellement une bonne viande. Notre culture de gastronomie française implique de nombreuses recettes à base de protéines animales et il n’est pas facile de changer cela en quelques années. De plus, je reste persuadé que nous continuerons à consommer ce type de protéines mais en privilégiant la qualité de celles-ci (producteurs locaux, traçabilité,…) donc moins de viande mais de meilleure qualité.

-Air of melty : On parle beaucoup du fait que les moins de 35 ans veulent aujourd’hui miser toujours plus sur l’authenticité et la transparence. Est-ce que l’on retrouve cette notion dans leur rapport à l’alimentation également ?

S.Z : Les nouvelles générations de consommateurs revendiquent effectivement un retour à l’authenticité, aux recettes de grand-mère sans toutefois vouloir à nouveau cuisiner comme avant. Cela explique les succès importants des kits à cuisiner dans les pays anglo-saxons et depuis peu en France avec des acteurs comme QuiToque, Illicofresto… Quant à la transparence, elle est essentielle pour rassurer les consommateurs en recherche de produits de qualité en phase avec leurs revendications : transparence sur l’origine des ingrédients, transparence sur l’étiquette, transparence sur les recettes, transparence de la marque… cela est donc plus facile pour des marques jeunes plutôt que pour les industriels qui ne sont pas habitués à cette nouvelle façon de produire et communiquer.

-Air of melty : En se tournant de plus en plus vers le régime végétarien, la jeune génération peut-elle influencer ses aînés ? Et les marques ?

S.Z : Ce tournant commence à avoir des effets sur les générations aînées mais cela prendra du temps car c’est, avant tout, tout un choix de consommation personnelle. Toutefois, la restauration a commencé à appréhender ce phénomène avec l’arrivée de nouveaux restaurants 100% végétariens et l’apparition de recettes végétariennes dans des restaurants classiques. Cela va démocratiser ce régime et confirmer que nous pouvons manger des recettes gourmandes malgré l’absence de protéines animales. Pour les marques, c’est beaucoup plus difficile à appréhender car cela sort, très souvent, de leur stratégie historique. C’est une remise en question complexe qui impacte l’organisation, le sourcing, la production et l’industrialisation. Il faudra donc des décisions fortes pour appréhender ce nouveau mode de consommation.

-Air of melty : Selon vous, quelles sont les trois attentes principales en matière d’alimentation recherchées par la jeune génération ? Et quelles sont les plus grandes erreurs actuellement commises par les acteurs de l’alimentation pour séduire les moins de 35 ans ?

S.Z : La jeune génération est en attente, en priorité, d’une alimentation gourmande, elle ne souhaite pas de faire de concession sur le plaisir de manger. Ensuite il faut associer, à ce prérequis, deux éléments essentiels : le produit doit être bon pour la santé de celui qui le consomme et pour la planète. L’industrie agro-alimentaire peut, parfois, surfer sur ces revendications sans vraiment les prendre en compte, en proposant des nouveaux produits avec ces valeurs mais le consommateur final n’est pas dupe. Le poids de la marque historique est souvent un malus pour ces industriels car les jeunes consommateurs ne croient plus les valeurs de celle-ci, c’est pourquoi ils ont tout intérêt à créer de nouvelles marques et laisser à leur commande des représentants de cette nouvelle génération.